Affaire Oudéa-Castéra : au collège Stanislas, culture du viol,
propagande anti-IVG et anti-homosexualité au programme
Article de Marie Piquemal<https://www.liberation.fr/auteur/marie-piquemal/> publié le 16 janvier 2024 à 21h16
«Mediapart» s’est procuré la fameuse enquête administrative, commandée à l’Inspection générale, qui dormait dans un tiroir du bureau du ministre depuis le mois de juillet. De quoi relancer la polémique dans laquelle se retrouve engluée la nouvelle ministre de l’Education, Amélie Oudéa-Castéra, qui a scolarisé ses enfants dans cet établissement.
A la lecture, on comprend vite pourquoi l’enquête administrative sur le très sélect établissement scolaire parisien Stanislas, où sont scolarisés les enfants de la nouvelle ministre de l’Education, végétait dans un tiroir depuis juillet dernier. Ni Gabriel Attal, Premier ministre et ex-ministre de l’Education, ni Amélie Oudéa-Castéra, qui vient de lui succéder rue de Grenelle, n’avaient intérêt à ce qu’elle sorte, vu sa teneur.
«Les classes de 4e par exemple, apprennent dans des livrets de catéchèse que “l’avortement signifie […] toujours tuer volontairement une personne humaine (sic) innocente”», révèle Mediapart, qui publie le rapport in extenso.
En trente pages condensées, les inspecteurs généraux retracent l’histoire de cet établissement, «l’esprit Stan» avec «ses boucs émissaires et ses chouchous». Et surtout, les dérapages à tous les étages.
Condamnation de l’avortement, conspirationnisme…
Les inspecteurs documentent des «dérives dans l’application du contrat d’association» qui lie l’établissement à l’Etat». Pourtant, la loi Debré de1959 donne des droits aux établissements privés mais aussi des obligations. Par exemple, tous les enseignants doivent respecter le principe de laïcité pendant les cours.
L’exercice du culte ne peut pas empiéter sur les enseignements, et reste facultatifs pour les familles. Or, relèvent les inspecteurs, «les familles qui souhaitent inscrire leur enfant à Stanislas n’ont pas le choix, l’assistance aux cours religieux est obligatoire». Une heure de caté par semaine, et quelle heure ! «Selon plusieurs témoignages, une intervenante à ces cours de catéchèse a pu déclarer que “l’avortement était encouragé parce que les fœtus étaient utilisés pour des médicaments, le Doliprane notamment”». Un autre ne craint pas d’assurer que «François Hollande était un danger pour la République puisqu’il défendait la théorie du genre», relate Mediapart.
Autre témoignage recueilli, à propos d’un catéchiste du collège, parent d’élève : «Il nous a parlé de l’homosexualité comme d’une maladie, et que si l’on se sentait homosexuel, il fallait se faire soigner dans une structure religieuse au Canada, que l’homosexualité venait du fait que quand la mère enceinte trompe son mari ou que son mari trompe sa femme, le bébé ressent tout et a le cœur brisé. Il nous a parlé de sodomie également. Il nous a parlé de viol, en disant qu’il fallait pardonner au violeur et que c’était difficile.» De quoi faire dire aux inspecteurs : «La mission ne peut que s’interroger sur le caractère répété des prises de position intolérables de ce catéchiste qui est, selon la mission, dans le déni et qui intervenait depuis trois ans auprès des jeunes.»
Une pression constante sur les élèves
Les inspecteurs s’alarment aussi du contenu des enseignements sur l’éducation à la sexualité, dans le cadre des cours de sciences de la vie et de la Terre (SVT) et d’éducation morale et civique (EMC). «Il ressort de la consultation, pour toutes les classes de collège, qu’un seul professeur assume traiter de la contraception, comme prévu par les programmes officiels.» Dans le privé sous contrat, les professeurs sont des agents publics, dépendant du ministère de l’Education nationale. Ils sont payés par l’Etat et sont donc tenus au strict respect des programmes. Le rapport pointe une dérive : «Le parti pris de certains professeurs de SVT de ne pas parler des infections sexuellement transmissibles (IST), les propos tenus lors des conférences d’éducation à la sexualité sur les dangers de la contraception chimique, et enfin les dérives relevées en catéchèse sont susceptibles pour la mission de porter atteinte à la santé des élèves.»
Les inspecteurs décrivent aussi «la sélection quasi permanente pour des résultats excellents aux examens et concours», «la pression entretenue dès le collège», avec la lecture des notes par le directeur. «Les résultats sont certes là mais au prix de cette constante mise sous pression des élèves, acceptée voire revendiquée par les parents», concluent les inspecteurs.