PRESBYTÈRES

La Libre Pensée 56 a été saisie d'une question :

« Selon la circulaire du 29 juillet 2011 relative aux édifices du culte, " [Les presbytères] peuvent être loués ou aliénés mais ils ne peuvent être mis gratuitement à disposition d'un ministre du culte".

Néanmoins, le Ministre de la transition écologique a eu l'occasion d'indiquer que " Pour la mise à disposition à titre gratuit à un prêtre desservant une paroisse d'un bâtiment du domaine privé communal par une délibération du conseil municipal, il y a lieu de considérer qu'elle s'effectue dans le cadre des dispositions du prêt à usage prévu aux articles 1875 et suivants du Code civil."

https://www.senat.fr/questions/base/2018/qSEQ181107935.html

N'y a t-il pas selon vos informations et analyses une contradiction entre la circulaire du 29/07/2011 et cette réponse du Ministère de la transition écologique ? »

C'est une question qui est très peu abordée. Elle n'apparaît pas dans les guides successifs de l'Association des Maires de France (Laïcité – Le vade-mecum de l'AMF – novembre 2015, Le maire et la laïcité – réponses pratiques novembre 2022).

Il semble curieux de faire appel à l'article 1875 du code civil concernant le prêt à usage. L'article 2 de la loi de 1905 dispose dans son article 2 : " La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l’état, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes." Dans son article 12, la même loi distingue les "édifices qui ont été mis à la disposition de la nation et qui servent à l'exercice public des cultes" qui sont mis à disposition à titre gratuit (art. 13) et ceux destinés "au logement de leurs ministres" qui sont laissés à disposition gratuite pendant les 5 ans suivant la promulgation de la loi (art. 14).

Les commentaires relatifs aux édifices du culte sont nombreux et complets. Les presbytères n'entrent pas dans cette catégorie.

Donc, les presbytères devenus propriété communale sont soumis aux règles du code général des collectivités territoriales et font partie du domaine privé des communes. Une question écrite https://legirel.cnrs.fr/spip.php?article145 apporte un éclairage plus complet ; la réponse indique :  "Un bien du domaine privé peut également être mis gratuitement à la disposition d’une personne publique ou privée. Cette possibilité est toutefois réservée aux activités que la collectivité locale souhaite aider à se développer." C'est clairement le cas pour des activités sportives ou culturelles. C'est plus difficile à comprendre s'il s'agit du logement du desservant ; aider à développer l'action cultuelle de celui-ci serait un pied de nez à la loi de 1905. Il est vrai qu'entre 2002 et 2018, il s'est passé des choses et que Macron a souhaité renouer le lien entre la France et L’Église... mais il n'a pas touché aux textes.

Un article https://www.actu-juridique.fr/breves/collectivites-territoriales/sort-dun-batiment-mis-par-une-commune-a-la-disposition-a-titre-gratuit-dun-pretre/ fait effectivement référence au code civil et à la mise à disposition gratuite.

Rions un peu : le maire de Mortain (Manche) a répondu à l'objection "Est-ce que la commune doit financier un lieu religieux avec la séparation de l’Église et de l’État ?" : « Oui, c’est la loi », a répondu la maire en ajoutant que la présence d’un prêtre « participait à l’attractivité de la commune pour les pratiquants ».

Sous réserve de ne pas avoir fait d'erreur dans cette recherche, il semble qu'en droit, la mise à disposition gratuite devrait être proscrite. Mais l'administration laisse faire et les réponses aux parlementaires montrent que la confusion règne.

Le principe de la gestion de tout patrimoine, dont le patrimoine privé de la commune, est de préserver les intérêts du propriétaire. Tout habitant d'une commune pourrait sans doute contester une mise à disposition gratuite du logement du desservant au détriment des finances communales.